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Les rivières en Corse comptent le moins de pesticides

jeudi 18 avril 2019

Les rivières et les lacs français débordent de pesticides suspectés d’être des perturbateurs endocriniens. Glyphosate, atrazine, chlordécone… des résidus d’herbicides et d’insecticides particulièrement néfastes pour la santé sont omniprésents dans les eaux de surface en France, révèle une étude inédite publiée mardi 16 avril à laquelle Le Monde a eu accès.
Réalisé par Générations futures, association en pointe dans le combat contre les pesticides, le rapport montre qu’en moyenne plus de 41 substances actives de pesticides ou de métabolites supposés perturbateurs endocriniens (PE) sont présents dans les cours d’eau.

Un article de Stéphane Mandard copyright Le Monde du 15/04/2019

Ce cocktail de molécules menace directement la faune aquatique et les écosystèmes, contribue à l’érosion de la biodiversité et n’est pas sans conséquence sur notre santé, alerte le rapport. Les PE sont en effet des substances capables d’interférer avec le système hormonal et impliquées dans une variété de troubles et de pathologies : de l’obésité à la baisse du quotient intellectuel en passant par des cancers des systèmes reproducteurs masculin et féminin.

Le record pour le Calvados avec 90 substances

Depuis une note de 2015 du Commissariat général au développement durable, on savait que la grande majorité (92 %) des cours d’eau français étaient contaminés par les pesticides utilisés massivement par les agriculteurs. Générations futures a cherché à quantifier la part de ces pesticides aux effets de perturbation endocrinienne.

L’association a d’abord identifié, à partir de deux bases de données (EU Pesticides database et TEDX qui porte spécifiquement sur les perturbateurs endocriniens), les pesticides (autorisés ou non) potentiellement PE. Elle a ensuite vérifié lesquels avaient été analysés par les agences de l’eau et répertoriés (département par département) dans la base de données nationale Naïades sur la qualité des eaux de surface.

Générations futures a dû remonter jusqu’à l’année 2015 pour obtenir la couverture territoriale la plus complète. Elle s’est également heurtée à des difficultés liées à l’absence d’harmonisation des méthodes et des listes de substances recherchées : les agences de l’eau n’utilisent pas les mêmes seuils de quantification et de détection et certaines substances ne sont pas testées dans tous les départements.

Sur la base des données 2015, le rapport établit qu’un total de 232 substances actives de pesticides ou de métabolites supposés PE ont été recherchés, soit une moyenne de 183 par département. En moyenne, plus de 41 (soit environ 23 %) ont été quantifiés. Avec des différences notables selon les départements.

Le record revient au Calvados (69 cours d’eau dont la Dives, l’Orne ou la Vire) avec pas moins de 90 substances quantifiées sur un total de 196 recherchées. En pourcentage, c’est la Moselle (91 cours d’eau dont la Moselle et la Sarre) qui occupe le haut du classement avec 49 % (67 sur 137 recherchées) de pesticides perturbateurs endocriniens suspectés quantifiés au moins une fois.
Du glyphosate même dans la Seine

Dans le trio de tête des molécules les plus présentes figure sans surprise le glyphosate, le célèbre désherbant de Monsanto. On en retrouve dans 37 départements et même à Paris, dans la Seine. Sur les six prélèvements effectués en 2015 au point de mesure du pont de Tolbiac, dans le 12e arrondissement, il a été quantifié à chaque fois.

Deux autres herbicides, l’atrazine-Déséthyl (un métabolite de l’atrazine quantifié dans 30 départements) et le métolachlore (15 départements), complètent le trio de tête. Preuve de leur persistance dans l’environnement, car ils sont interdits depuis 2003. Utilisé jusqu’en 1993 dans les bananeraies aux Antilles pour lutter contre le charançon, l’insecticide chlordécone contamine toujours les rivières en Martinique (les données n’étaient pas disponibles dans la base Naïades pour la Guadeloupe en 2015).

Au niveau des concentrations, certaines dépassent la limite autorisée (2 microgrammes par litre) pour la production d’eau potable. Ainsi, 35 dépassements sont constatés pour le glyphosate et 33 pour le métolachlore. Mais le danger est plus diffus. Il est souvent impossible de fixer un seuil d’exposition en dessous duquel aucun effet ne serait susceptible de survenir, s’accordent les chercheurs.

« Ces données sont inquiétantes, commente François Veillerette, le directeur de Générations Futures. Elles révèlent l’existence d’importants cocktails de pesticides perturbateurs endocriniens suspectés dans les eaux de surface de nombreux départements français et montrent que la chimie agricole menace directement la biodiversité aquatique  ».

Une étude scientifique remarquée a démontré dès 2010 les effets, même à faible dose, de l’herbicide atrazine sur le développement des grenouilles : les mâles se féminisent ou peuvent devenir hermaphrodites.

« Quand un écosystème aquatique est exposé à autant de molécules, cela signifie que l’environnement dans lequel vivent les humains est également très contaminé, poursuit François Veillerette. C’est un bon indicateur des expositions humaines ». Le directeur de Générations futures souligne « un risque de contamination des ressources en eau potable ». D’une part parce que les stations d’épuration ne filtrent pas tout. D’autre part parce que dans certaines régions, comme la Bretagne où les nappes phréatiques sont particulièrement polluées par les rejets de l’agriculture intensive, l’eau de surface sert à produire l’eau de consommation. Résultat, on peut retrouver des molécules comme l’atrazine dans l’eau du robinet.

« Mettre en œuvre une politique pour leur interdiction totale »

«  Il est plus que temps d’agir !  », tonne François Veillerette qui déplore la « frilosité » du gouvernement sur le dossier des perturbateurs endocriniens. La France s’est dotée en 2014 d’une première « stratégie nationale », qui n’a pas permis de réduire l’exposition à ces substances. Aussi, une deuxième « stratégie » est en discussion. « Il faut mettre en œuvre d’urgence une politique qui vise réellement à leur interdiction totale », insiste le directeur de Générations futures qui invite également le gouvernement à porter le fer au niveau européen. Début avril, un rapport commandé par le Parlement européen rappelait que la réglementation européenne ne protégeait pas les citoyens.

A plus court terme, Générations futures demande au gouvernement de réviser l’arrêté du 4 mai 2017 sur l’utilisation des pesticides afin d’interdire leur épandage à proximité des lieux de vie et de tous les points d’eau. L’association réclame également d’exclure de la mise sur le marché les pesticides perturbateurs endocriniens avérés ou suspectés.

Lors du premier comité d’orientation et de suivi du nouveau plan national de réduction des produits phytosanitaires (Ecophyto II +), le 10 avril, le gouvernement a redit sa « volonté ferme » de réduire l’usage des pesticides de moitié d’ici à 2025 et de sortie du glyphosate « pour une majorité des usages » d’ici à la fin 2020. Lors de cette réunion, le ministère de l’agriculture n’a pas été en mesure, pour cause de panne informatique, de communiquer les chiffres de 2018.

"Les dernières données disponibles montrent cependant que ces objectifs ne seront pas atteints sans un changement radical de stratégie : en 2017, la consommation de pesticides était en très légère baisse (68 817 tonnes contre 70 640 sur la période 2015-2017) et les ventes de glyphosate ont même augmenté (8 831 tonnes en 2017 contre 8 673 tonnes depuis 2015).

Stéphane Mandard copyright Le Monde du 15/04/2019

Qu’en est il en Corse ?
Si la Corse n’est pas exempte de perturbateurs endocriniens elle est la région, par sa géographie et son histoire, qui en compte le moins.
En Haute Corse 7 PE sont signalés, en Corse du Sud 4 PE sont signalés...

Voir la carte des PE par département